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‘L’intégrité de la personne et l’authenticité de la sexualité’ (Communio n° II-4, juillet 1977).

Les polémiques contre le prétendu rigorisme de l'enseignement ordinaire de l'Église catholique en matière de morale sexuelle ignorent qu'il s'agit là, en fait, des conditions de l'authenticité du don réciproque des personnes. Ce que promeut l'Église, c'est un respect de la sexualité proprement humaine.

‘L’enseignement de la philosophie et les sciences humaines’ (Cahiers philosophiques n° 1, septembre 1979) - avec une contribution de Jean Cachia.

La philosophie ne peut ignorer que la pratique scientifique elle-même, des sciences humaines comme des autres, met en question l'idée d'une séparation entre la science et la philosophie. L'étude des sciences dans le but d'une réflexion sur leurs positions fondamentales apparaît donc comme un moment nécessaire de l'activité philosophique.

‘La religion dans les limites de la classe de philosophie’ (Revue de l’Enseignement philosophique, 36ème année-n° 4, avril-mai 1986).

Un enseignement philosophique sur la religion devrait amener les élèves à pouvoir penser ce qu'ils ont d'abord recontré sous la forme d'usages et de croyances qu'on leur a transmises, ou au contraire qu'ils ne partageaient pas. Pascal exigeait des libertins de son temps "qu'ils apprennent au moins quel est la religion qu'ils combattent". On serait aujourd'hui tenté d'exiger de beaucoup de croyants qu'ils connaissent un peu mieux la religion qu'ils professent. La philosophie de la religion peut contribuer à l'un et à l'autre.

‘Aristote et l’éthique de la finitude’ (Cahiers philosophiques n° 33, décembre 1987 – repris dans Au service de la Sagesse).

L'Éthique à Nicomaque veut arracher l'homme, non pas à sa nature, mais, au nom de sa nature, à cette servitude morale que sont en vérité l'attachement ou le consentement à la finitude. C'est une morale d'esclave qui enseigne à refuser, alors qu'on peut y accéder, le bien suprême offert à la nature intellectuelle, soit la connaissance du plus haut intelligible : l'être divin "auquel sont suspendus le ciel et la nature".

‘Les Lumières étaient-elles révolutionnaires ?’ (Revue de l’Enseignement philosophique, 39ème année-n° 6, juillet-août 1989 – repris dans Au service de la Sagesse).

Il n'y a pas de philosophie des Lumières, parce que les Lumières ne sont la philosophie de personne. Elles dénomment une époque de débat philosophique entre deux révolutions qui furent chacune l'oeuvre d'un philosophe. Descartes voulait rebâtir la métaphysique et la science en les affranchissant d'une scolastique ringarde et déliquescente : il le fit en repliant la raison sur elle-même au détriment de l'expérience. Kant voulut sauver la raison scientifique contre la dérive de l'empirisme sceptique, et sauver la liberté morale contre le scientisme: il le fit au détriment de la connaissance métaphysique, à laquelle il substitua un fidéisme philosophique.

‘Individualité et personnalité. L’embryon humain : une personne’ (Communio n° XIV-6, novembre-décembre 1989 – repris dans Faire naître).

Ou bien l'on reconnaît que l'appartenance génétique à l'espèce est le seul critère objectif, indépendant notamment de toute forme de croyance, d'après lequel un individu peut et doit être reconnu comme une personne. On admettra alors que le droit de vivre est pour l'embryon un droit naturel, une exigence sans laquelle il ne pourra accomplir sa vocation naturelle à l'humanité. Ou bien l'on cherche à s'affranchir de ce critère objectif et l'on se condamne à déterminer arbitrairement à partir de quand un individu engendré par une femme et un homme devient une personne humaine. On livre alors des vies innocentes à un arbitraire dont les effets ont déjà dépassé de loin ceux des tyrannies les plus meurtrières que l'histoire ait connues.

‘Maurras et le positivisme’ (Actes du stage Archives vivantes – Toulouse 1991 : Les Droites et février 34).

Maurras n'a jamais prétendu ni voulu être un philosophe. D'aucuns voient aujourd'hui dans son utilisation de la pensée d'Auguste Comte une dérive et une compromission dont il fautdrait laver la pensée du maître, laquelle trouverait un héritier plus authentique dans le radicalisme d'Alain. Quoi qu'il en soit, une telle dérive, si elle existe, peut avoir l'intérêt de découvrir certaines virtualités pratiques du système théorique qu'elle mobilise.

‘Le tout, la forme, l’élément’ – Une exégèse du Théétète chez Aristote et Thomas d’Aquin (Revue de l’En­seignement philosophique, 43ème année-n° 3, janvier-février 1993).

On trouve, dispersées dans les dialogues platoniciens, les prémices d'une réfutation de ce matérialisme qu'on pourrait dénommer élémentarisme, puisqu'il revient à réduire la réalité ou substance d'un composé, tel qu'un corps naturel ou artificiel, à celle des éléments qui le constituent. Ce qui se trouve chez Platon à l'état aporétique (Théétète 204b s) ou hypothétique (Parménide 157b s) a été repris par Aristote et développé dans une ontologie du composé. Les arguments et les thèses d'Aristote, commentés par saint Thomas, anticipent singulièrement non seulement les avancées spéculatives du dernier Leibniz ou du Kant de la troisième Critique, mais du même coup certains de nos plus actuels débats.

‘Une régression ptoléméenne en philosophie ? Kant et la question du temps’ (Revue de l’En­seignement philosophique, 46ème année-n° 4, mars-avril 1996 – repris dans Au service de la Sagesse).

Kant passe pour avoir établi que le temps n'est qu'une structure a priori de notre subjectivité, que pour autant nous ne connaissons que des phénomènes, et que pour l'avoir ignoré, la métaphysique précritique s'est condamnée à l'antinomie à son sujet. Il est néanmoins étonnant que, pour attester cette dernière, Kant présente comme des preuves des arguments que ladite métaphysique considérait comme des sophismes.

Rapport sur la 1ère composition écrite de l’agrégation externe de philosophie : Y a-t-il une expérience métaphysique ? (CNDP 1996). Rapport 1996

Explication du Traité des Passions de l’Âme de Descartes (Revue dioti n° 2, Toulouse 1997).

‘L’inhumain’ (Revue dioti n° 3, Toulouse 1998 – repris dans Disputes philosophiques).

‘L’existentialisme métaphysique de Thomas d'Aquin’ (Revue dioti n° 6 Ellipses?CRDP Midi?Pyrénées 1999 – repris dans le Cahier Saint Thomas d’Aquin, Cerf 2010).

‘L’intuitivité de l’intellect selon Thomas d'Aquin’ (Revue thomiste 2000 – n° 2 – repris dans Au service de la Sagesse).

Au début du XXe siècle, le P. Rousselot, dans son livre magistral, L'Intellectualisme de saint Thomas (1908), insistait sur la déficience de la connaissance humaine, rationnelle, c'est-à-dire conceptuelle et discursive, par rapport aux connaissances divine et angélique, censément plus intuitives que la première. Si toutefois l'intuition de l'essence divine est bien ce qui est promis à la science des Bienheureux, la foi qui fait espérer celle-ci suppose selon Thomas une connaissance intellectuelle des préambules qui la motivent, laquelle suppose que l'intellect humain est bien capable d'une certaine intuition de l'être, alors même qu'il n'est pas encore en état d'avoir celle de l'être absolu.

‘Le rationalisme philosophique et la question du mal’ (Revue thomiste 2000 – n° 4).

Inaugurant l'idéalisme moderne, Descartes ouvrait la voie à un rationalisme philosophique qui devait se révéler incapable d'appréhender le mal comme tel, soit en niant la liberté de la volonté en Dieu comme en l'homme (Spinoza), soit en la pensant d'une manière qui en fin de compte l'annule (Leibniz). La métaphysique non rationaliste de Thomas d'Aquin évitait cette impasse.

‘La théorie aristotélicienne du lieu – Physique, IV, 1-6 (in La nature, Ellipses 2001).

La conception aristotélicienne du lieu peut être considérée comme relativiste, au sens que la physique contemporaine a donné à ce terme depuis Einstein. Le lieu y est en effet pensé comme une relation entre corps, elle-même référée en dernière instance au seul référentiel possible pour Aristote, possible parce que réel, à savoir l’univers lui-même, qui n’est référable à rien d’autre. Il est clair que la spatialité des corps ne jouit ici d’aucune indépendance par rapport à leur existence et à leur nature : le lieu n’est pas une réalité séparable, et c’est pourquoi le traité des Catégories en fait un accident : le lieu est réel comme limite de l’enveloppant, être quelque part est un prédicat accidentel de l’enveloppé. L’argumentation d’Aristote conduit à récuser toute forme de substantialisation ou d’absolutisation de l’espace.

‘La critique kantienne des preuves de l’existence de Dieu’ (Revue thomiste 2001 – n° 4 – repris dans Au service de la Sagesse).

Kant a légué à sa postérité une thèse qui est peut-être aujourd'hui la plus communément admise, dans le grand public comme dans l'Université, au-dedans des Églises autant qu'au dehors : à savoir que rien n'est rationnellement connaissable de Dieu, parce que son existence est indémontrable et que, plus généralement, aucune connaissance métaphysique théorique n'est possible. Si toutefois on ne se contente pas d'admettre cette idée reçue, et que l'on examine les raisons de Kant, on pourra s'apercevoir que c'est la critique kantienne qui est contradictoire, plutôt que la métaphysique qu'elle prétend réfuter.

‘Ontologie et théologie’ (Revue thomiste 2002 – n° 2 – repris dans Disputes philosophiques).

Ontologie et théologie dénomment deux orientations de la métaphysique, dont la possibilité émerge dès l'invention aristotélicienne de la "philosophie première", définie comme "science de l'être en tant qu'être". Aristote a pensé que cette dernière ne s'accomplissait que dans une science du divin. Heidegger a quant à lui dénoncé, dans le caractère onto-théo-logique de la métaphysique issue de la pensée grecque, un "oubli de l'être", et revendiqué pour la philosophie un point de vue "ontologique" qui dépasserait celui de la métaphysique. On s'interroge ici sur le sens et la possibilité d'une telle ontologie non métaphysique qui, ne confiant plus la pensée au logos, n'en cherche plus l'achèvement dans une science de l'étant premier, cause et fondement des autres.

‘La raison et le mal’ (Actes de la Société toulousaine de philosophie, 2002 – repris dans Au service de la Sagesse).

‘La volonté selon Thomas d'Aquin, ou la puissance de l’amour’ (Sképsis, décembre 2002 – repris dans Au service de la Sagesse).

‘Sagesse et métaphysique - à  propos de « La sagesse des modernes »’ (Bulletin de littérature ecclésiastique CV/3 Juillet-Septembre 2004, Institut catholique de Toulouse – repris dans Au service de la Sagesse).

‘Quel fondement pour les valeurs ?’ (Collection Les idées contemporaines – GREP Midi-Pyrénées – saison 2004-2005 – repris dans Au service de la Sagesse).

En affrontant le nihilisme, dont il donna la formulation achevée, Nietzsche a légué au XXème siècle le problème de la fondation des valeurs morales, jusqu’à mettre en doute le sens même d’une telle question, et la possibilité de la poser : l’idée d’un fondement, autrement dit d’une raison d’être fondatrice, se trouvait éliminée, en même temps que les valeurs de l’humanisme hérité des Grecs et de la Bible, par la proclamation de la « mort de Dieu ». Les valeurs se trouvaient réputées sans fondement rationnel qui en feraient de vraies valeurs, et considérées comme autant d’expression de la « volonté de puissance », individuelle ou collective. De nos jours, des auteurs de renom tels que Luc Ferry ou André Comte-Sponville inscrivent leur pensée dans ce même horizon ontologique, mais se défendent d’être nietzschéens : ils revendiquent ce même humanisme que Nietzsche vomissait, tout en récusant à leur tour la possibilité de fonder en raison ses valeurs, et en référant celles-ci, d’une manière volontariste, à l’idée d’une autonomie de la conscience humaine. On peut se demander quelle possibilité il y a de justifier l’universalité revendiquée par l’humanisme, en dehors de toute référence à une réalité et à une volonté transcendant celles de l’homme.

‘Éducation et philosophie’ (Recherches philosophiques 2006/1, Revue de la Faculté de philosophie de l’Institut catholique de Toulouse – repris dans Au service de la Sagesse).

‘L’existence est-elle un acte ?’ (Revue thomiste 2007 – n° 2 – repris dans Au service de la Sagesse).

Pour réaliser son projet d'unifier en un système logique la totalité de l'histoire de la philosophie, Hegel a cru devoir donner pour premier principe à  la métaphysique un argument de Gorgias dans lequel Aristote voyait un sophisme : il consistait en effet à conclure de l'indétermination de la notion d'être, considérée en elle-même, l'identité de l'être et de son opposé, le néant. Aristote avait cependant montré que cette conséquence ne s'ensuit nullement si l'on refuse de confondre le sens relatif de l'être (être quelque chose) et son sens absolu (exister). C'est pour penser à la fois la distinction et l'articulation de ces deux sens que Thomas d'Aquin a recouru à la notion aristotélicienne d'acte, dans son opposition à la puissance, non sans modifier en profondeur le sens des thèses d'Aristote. La métaphysique thomasienne se trouvait ainsi démarquée des idéalismes ultérieurs, et ouvrait des perspectives en direction d'une philosophie pratique de la liberté humaine.

‘Le sens communCommentaire d’un texte d’Aristote : De l’âme, III, 2, 426b 8-22’ (Philopsis, janvier 2008).

‘La nuit des philosophes’ (Revue Carmel n° 130 – décembre 2008).

‘Y a-t-il des vérités éternelles ?’ (Revue thomiste 2009 – n° 3).

La notion de vérité éternelle a été reçue en philosophie comme une évidence depuis qu'Aristote y a recouru pour caractériser toutes les vérités connaissables de science sûre. Il nous est pourtant devenu douteux que les vérités que  nos sciences sont capables de produire puissent être ainsi qualifiées. Reste alors à envisager que de telles vérités soient réservées à la métaphysique, si l'on peut reconnaître en celle-ci une forme authentique de connaissance. On s'explique alors que Heidegger ait pu déclarer philosophiquement douteuse l'existence de telles vérités, parce qu'il pensait  qu'il n'y a de vérité que pour l'homme, et que Thomas d'Aquin ait pensé que c'est en Dieu qu'elles se trouvent, mais en lui seul.

‘La guerre et la paix au regard de la charité dans la théologie de saint Thomas d’Aquin’ (in  La guerre et la paix, Cahiers Disputatio n° 2, F.-X. de Guibert 2010).

‘La notion d’autonomie’ (Recherches philosophiques, Institut catholique de Toulouse 2010).

‘Naître homme : quel programme !’ (in La vie à son début, Rapports de l’Académie nationale de médecine, Lavoisier 2011).

La notion de programme se présente comme une manière adéquate de concevoir la nature en général et l’homme en particulier. Mais dans la mesure même où elle échappe au déterminisme dont on a cru longtemps que la science ne pourrait se passer, elle permet de comprendre comment l’homme peut non seulement être inscrit, mais s’inscrire au sein de la nature, sans que l’existence et l’exercice de sa liberté contredise celle-ci. La science a aujourd’hui de quoi nous faire savoir que nous sommes naturellement programmés pour la liberté, et que, pour autant qu’il y ait là une spécificité naturelle qui ne dépend d’aucune volonté humaine, elle met les personnes en demeure de reconnaître l’inviolabilité des droits qu’elles possèdent par nature, et constitue ainsi le fondement de la justice de leurs rapports mutuels.

‘Le mal : absence d’être et présence d’une personne ?’ (Bulletin de littérature ecclésiastique CXII/4 Octobre-Décembre 2011, Institut catholique de Toulouse).

‘Science et conscience’ (Revue thomiste octobre-décembre 2011 – repris dans Questions de philosophie).

‘Causalité et finalité’ (Colloque SIPR 2011).

Persona non grata. Les raisons méconnues du respect de la personne’ (Bulletin de littérature ecclésiastique CXIII/3 Juillet-Septembre 2012 - Institut catholique de Toulouse).

Bien que la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme ait pris pour principe que tout être humainement engendré doit être reconnu comme une personne dont la dignité et les droits sont les mêmes que ceux de tout autre, des êtres humains voient leur droit à la vie dénié avant leur naissance ou à l'approche de leur décès. Un tel déni de dignité personnelle présuppose que l'humanité de certains êtres pourrait être décidée par d'autres, alors qu'elle est un fait de nature qui ne dépend de la volonté de personne. À ceux qui pensent qu'un individu engendré humainement n'est pas une personne humaine, sujet des droits humains dès sa conception et aussi longtemps qu'il vit, il incombe  d'expliquer comment est possible la transsubstantiation miraculeuse qui peut produire un pareil changement.

‘Thomas d’Aquin et le droit des gens’ (Recherches philosophiques, Institut catholique de Toulouse 2013).

‘Laïcité : un principe théocratique ?’ (Nova et vetera, avril mai juin 2013).

‘Qu’est-ce que les Lumières ?’ (Nova et vetera, juillet août septembre 2013).

Ce que les langues anglaise et allemande appellent respectivement, au singulier, Enlightenment et Aufklärung, est dénommé en français Lumières. Peut-être cette appellation au pluriel est-elle plus adéquate que les précédentes, en dépit de l’usage qui en est fait. On se réclame volontiers des Lumières comme si le sens de cette référence allait de soi, et suffisait à exprimer l’inscription dans une modernité considérée comme un acquis historique définitif. Les Lumières ont pourtant bel et bien constitué une pluralité, qui ne fut pas une simple diversité de pensées s’enrichissant mutuellement de leurs différences, mais un conflit entre des positions radicalement contradictoires, sur des points décisifs en politique comme en philosophie : la civilisation, la connaissance, la religion, la liberté. Tout en se réclamant d’elles, Emmanuel Kant fut lucidement conscient de ce que les Lumières furent une source de trouble plutôt que d’éclairement, en théorie autant qu’en pratique.

‘Métaphysique et logique spéculative : la critique hégélienne du principe de contradiction’ (Revue thomiste juillet-septembre 2013).

Depuis la République de Platon, la spéculation métaphysique s’est découvert comme fondement ultime un premier principe dit « de contradiction », consacré par Aristote comme « l’axiome des axiomes », parce que sous-jacent à la vérité et à la vérification de toute proposition qui peut avoir valeur de principe. Hegel a pour sa part inauguré une mise en question de sa validité à partir d’une réfutation interne, et non pas, comme ce fut parfois le cas par la suite, au motif d’une prétendue inapplicabilité du principe à des domaines théoriques tels que la physique fondamentale. La réfutation hégélienne n’en a pour autant que plus d’intérêt, et son examen a sans doute une portée décisive, puisqu’elle constitue une mise en cause de l’ensemble de la métaphysique telle qu’elle fut pratiquée jusqu’à Kant, lequel en a selon Hegel aperçu certaines contradictions – les fameuses « antinomies » –, sans néanmoins reconnaître que cette contradiction n’est pas ce qui condamne la métaphysique à l’erreur, mais qu’elle constitue au contraire, comme Hegel le pense – à tort ou à raison ? –, sa vérité essentielle.

'Hasard, probabilité, évolution" (in Évolution et christianisme, Cahiers Disputatio n° 4, éd. l'Harmattan, 2013).

Le calcul des probabilités atteste que la production des événements improbables résulte d’une cause qui vient se surajouter à celles qui permettent de définir le dispositif comme un système aléatoire. On peut comprendre à partir de là l’immense difficulté qu’il y a à concevoir l’appari­tion des vivants et leur évolution en un point du cosmos comme des processus aléatoires, pensables en termes probabilitaires.

‘Culture et nature : libre méditation sur l’écologie’ (Bulletin de littérature ecclésiastique CXV/2 avril-juin 2014, Institut catholique de Toulouse).

Il est heureux qu’un nombre toujours croissant de personnes reconnaissent aujourd’hui comme une évidence l’urgence du souci écologique d’une sauvegarde de l’environnement terrestre, et la responsabilité qui incombe dans ce domaine à la génération présente envers les générations futures. Les dérives néo-paganisantes de l’écologisme sont néanmoins de nature à renforcer la méfiance à l’égard de l’instrumentalisation idéologique de l’écologie, et elles donnent argument à ceux qui récusent les mises en gardes de celle-ci, parce qu’elles mettent en cause certains intérêts, partiels et à court terme, d’ordre économique. C’est pourquoi il paraît important de ré-évangéliser l’écologie, dont on peut se demander si elle a vraiment un sens hors de la perspective d’une création de l’Univers par un Dieu sage et bon, qui lui donne son sens. Cette perspective fut celle de la Bible, dans laquelle la seigneurie de l’être humain au sein de la nature créée, affirmée de manière insistante, était bien l’injonction d’une prise en charge responsable de celle-ci – « cultiver le jardin » – et non pas l’invitation à une prédation dérégulée.

‘L’explicitation du réalisme noétique d’Aristote chez Thomas d’Aquin’ (Nova et vetera, avril mai juin 2014).

La compréhension thomasienne de la connaissance humaine peut être présentée comme l’approfondissement le plus rigoureux de la formule d’Aristote qui identifie l’intelligible en acte et l’intellect en acte. Cette proposition signifie assurément que l’intelligible abstrait de l’image des réalités sensibles n’existe actuellement, en tant que tel, que dans l’intellect et moyennant son activité spontanée de conceptualisation, alors qu’il ne se trouve qu’en puissance au sein des réalités conçues. Mais on peut aussi comprendre que cet intelligible en acte, autrement dit le concept, n’est rien d’autre que l’acte même par lequel l’intellect conçoit, c’est-à-dire ramène une diversité d’étants de même espèce à une même unité intentionnelle. La formule aristotélicienne paraît alors avoir l’intérêt d’interdire toute chosification du concept, dont saint Thomas a enseigné avec insistance qu’il n’était d’aucune manière, en première intention, l’objet de la connaissance (quod cognoscitur), mais seulement son moyen (quo cognoscitur). La chosification du concept commence lorsque l’on cesse d’y voir l’acte même par lequel l’intellect vise consciemment une multitude de réalités réellement semblables. C’est cette chosification qui est à l’origine des formes modernes de l’idéalisme, comme en témoigne à l’évidence l’œuvre de Descartes, dont l’innéisme a préparé l’apriorisme transcendantal de Kant.

'Relativité de l'absolu ?' (Bulletin de littérature ecclésiastique CXV/3 juillet-septembre 2014, Institut catholique de Toulouse).

En disant que "tout est relatif" est "le seul principe absolu", Auguste Comte énonçait une proposition autoréfutante. Le dogme trinitaire donne néanmoins à penser une relativité (interne) de l'Absolu lui-même, que Bachelard a confirmé, sans doute à son propre insu, en affirmant : "Au commencement était la relation".

‘La causalité créatrice’ (in La Création, SIPR – Presses universitaires de l’IPC, septembre 2014).

Selon Thomas d'Aquin, la notion de création ex nihilo n'est pas celle d'un mouvement  transformateur, mais celle d'une relation réelle de dépendance de la créature à l'égard d'un Créateur qui ne lui est nullement relatif. Elle ne peut être néanmoins pensée que comme l'effet d'une causalité productrice et radicalement inauguratrice. L'usage de la notion de causalité ne peut être ici, comme celui de la notion d'être, qu'analogique. Les aspects proprement novateurs qui se laissent découvrir dans la production artistique autant que dans l'évolution biologique permettent de voir dans cette analogie autre chose qu'un voile verbal jeté sur une idée creuse.

‘Nature, hasard, création’ (Revue thomiste 2015 n° 3).

Les Stoïciens et les Épicuriens ont cru à tort – avec des visées opposées – que le hasard pouvait constituer une objection à la providence divine. Et les seconds, comme à leur suite les darwiniens, y ont vu à tort un substitut possible de la causalité créatrice. Ce serait le cas si le hasard pouvait être considéré comme premier, ce qui est impossible, et si d’autre part il devait être jugé, du fait de sa contingence irrationnelle, étranger à toute intelligibilité. Or les mathématiques ont précisément établi le contraire, depuis qu’elles ont inventé le calcul des probabilités et, plus récemment, lorsqu’elles ont élaboré une théorie du « chaos », qui montre comment la nature combine subtilement le régulier et l’aléatoire. La science contemporaine fait plus que jamais apparaître comment le hasard s’intègre à l’ordre intelligible de l’univers naturel, et, loin d’en compromettre l’intelligibilité, peut y jouer un rôle, comme Thomas d’Aquin l’avait reconnu.

'Quelle culture pour sauver la civilisation ?' (Bulletin de Littérature Ecclésiastique Juillet-septembre 2016).

La mortalité des civilisations est un fait non moins patent que celui d’un choc entre elles : l’histoire atteste qu’elles menacent l’idée même qu’elles mettent en œuvre, idée que la philosophie a pensée depuis la République de Platon. Ce dernier en appelait à la culture commune aux cités grecques pour sauver la civilisation grecque de l’autodestruction que leur rivalité engendrait. C’est par leur culture que les civilisations non seulement se promeuvent, mais aussi se survivent, en s’imprégnant les unes les autres. On veut méditer ici la relation involutive entre la civilisation et la culture, nécessaires chacune à la sauvegarde de l’autre : sans civilisation, la culture n’est pas transmissible, mais seule la culture peut, en prémunissant les personnes contre la barbarie intérieure, retenir une civilisation sur la pente de la barbarie externe. La question est aujourd’hui de savoir si un matérialisme consumériste mondialisé serait une culture commune suffisante pour civiliser le rapport entre les cultures issues des grandes civilisations du passé, qui sont toujours à l’œuvre sur le théâtre de l’histoire.

‘Le politique et le spirituel’ (dans L'Etat et le pouvoir, coll. sous la direction de J.-P. Coujou, Domuni Press, octobre 2016).

'Rousseau et l’état de nature’ (dans Problématiques du contrat social, coll. sous la direction de J.-P. Coujou, Presses universitaires de l'Institut catholique de Toulouse, août 2018).

'Causalité et finalité' (Revue thomiste 2019, n° 3, p. 355-380).

'Thomas d'Aquin et l'usure" (Carmel n° 172, septembre 2019).

Méditation en temps de pandémie (Nova & Vetera, juillet-août-septembre 2020).

Note sur la conception catholique de la foi (ALETHEIA, n° 58 - juin 2021).

La redécouverte de la cause formelle chez Kant : une occasion manquée ? (Revue thomiste, avril-juin 2022).

Dans sa Critique de la faculté de juger (1790), Emmanuel Kant réhabilite les concepts majeurs de la physique aristotélicienne, à l’encontre du mécanicisme classique, qu’il avait pourtant lui-même voulu consacrer dans la Critique de la raison pure (1781). Si la notion de finalité naturelle se trouve ainsi restaurée dans son véritable sens, il n’en va pas de même de la notion de cause formelle, que Kant présente comme une force, à l’instar d’auteurs critiqués en son temps par Thomas d’Aquin.

In his Critique of Judgement (1790), Immanuel Kant rehabilitates the most important concepts of Aristotle’s physics, against the classical mechanicism, the philosophical foundation of which Kant had nevertheless pretended to establish in his Critique of Pure Reason (1781). If the notion of a natural finality is thus restored in its authentic meaning, one cannot say the same about the notion of a formal cause, which Kant presents as a force, as some authors did, whom Thomas Aquinas had criticized in his time.

Éloge de la démesure (dans Mesure et excès, dir. Philippe Guisard, Christelle Laizé & Antoine Contensou, Ellipses, octobre 2023).